Bilan de 16 années du travail du Point de Capiton Aux membres du CA, Voici 16 ans, un 9 novembre 1989, avait lieu la première
réunion publique du Point de Capiton, à Carpentras.
L'association avait été créée
en septembre 1989 par Mireille Laurent, (installée à
Carpentras comme psychothérapeute) Françoise Ricard
(enseignante en Ecole Maternelle) et moi-même, ( psychanalyste
à Avignon et Montfavet depuis plus de dix années). Pour chacune d'entre nous, cette histoire était
aussi liée au féminisme, à ce qu'il avait interrogé
de la psychanalyse et du politique. Ce courant du féminisme
qui, tout en considérant la différence des sexes comme
une richesse pour l'humain, fait de l'égalité sociale
et symbolique son horizon. L'art alors, nous semblait pouvoir démontrer,
sur tous ses versants, de la peinture à la poésie, que
la création est ce qui permet à l'humain, homme ou femme,
d'interroger le Réel, celui qui est infiltré dans chacune
de nos vies, et dont les contours nous échappent. La première réunion publique du Point
de Capiton avait eu lieu à Carpentras où nous avions
été accueillis gracieusement par l'association "
Solidarité-Femmes ". Ainsi, contrairement à ce que nombre de personnes
imaginent, le Point de Capiton n'est pas né de la nécessité
d'organiser le colloque de Carpentras, tentant de dire et faire silence
tout à la fois, colloque qui a semblé être la
seule réponse possible à la profanation du cimetière
juif de Carpentras en mai 1990. Les événements qui ont fait suite à
la profanation ont poussé l'association à situer son
travail sur plusieurs axes que l'actualité nous imposait, ceux
de l'Histoire et de la mémoire. Si la transmission de la psychanalyse, dans son tranchant, avait donc été à l'origine de sa création, le Point de Capiton s'est trouvé sommé par l'histoire en train de se dérouler, d'interroger la mémoire et le déni de l'histoire récente de la seconde guerre mondiale et de la Shoah, déni orchestré par l'extrême droite alors entamant sa percée triomphante dans le midi de la France, puis dans d'autres régions. Poursuivant ce fil, le Point de Capiton interrogea les grands génocides de ce XXème siècle, les non-dits et les occultations liées à la guerre d'Algérie, la question de l'immigration et du statut d'étranger, ainsi que les grands problèmes éthiques (liés au social, au médical, à la science et aux techniques, .) auxquels sont confrontés les citoyens, et particulièrement les psychanalystes dont l'écoute ne peut ex-ister sans une préoccupation, un intérêt, une théorisation qui concerne le politique, au sens de " ce qui se passe dans la cité ".
Le dernier colloque, qui eut lieu en novembre 2003 sur
la scène nationale-Théâtre de Cavaillon, "
Poésie et Réel : La poésie, margelle du Réel
? ", marqua, pour moi, un temps important de ma présidence
: la possibilité de faire entendre, par la poésie et
le théâtre, l'humanité des fous et de la folie,
dont l'étouffement par le comportementalisme et la mise en
statistique des populations les plus démunies et des soignants
rendus à l'état d'impuissance, sont un des symptômes
graves de nos sociétés. Ainsi, la psychanalyse, il me semble, a été transmise dans le cadre du Point de Capiton, par la voie subversive qui doit être la sienne, et non par l'autocélébration d'une conceptualisation qui appartient à ces maîtres de génie et qu'ils nous ont transmise, non pour en faire des objets de musée mais afin que nous osions l'interroger, la mettre à l'épreuve de l'actuel. Aujourd'hui, je peux dire que cette association que j'ai présidée pendant 16 années, avec tant de plaisir, mais aussi tant d'efforts renouvelés, avec le souci de ne pas sombrer dans le sordide qu'entraînent les non-dits ou les malentendus, de ne pas se laisser entraîner dans des compromissions liées à l'exercice d'un pouvoir, si malingre soit-il, si dérisoire, avec la préoccupation de mettre à l'uvre dans le collectif ce que la pratique de la cure indique quant à la subversion d'une parole portée par un désir qui ne cède pas sur l'essentiel, je veux parler de la réalité de l'inconscient, aujourd'hui donc, je peux dire que cette association vivante et en éveil m'a apporté autant que j'ai pu, je l'espère, lui donner : Tant de rencontres inoubliables, avec des psychanalystes,
des philosophes, des mathématiciens, des artistes, des historiens,
des psychologues cliniciens, des écrivains, des sociologues,
des enseignants, des linguistes, des poètes,
.des femmes
et des hommes qui cherchent
, Tout cela, et aussi ce sillon creusé par l'écriture littéraire et poétique, en parallèle de cette aventure du Point de Capiton, et à laquelle je veux aujourd'hui accorder plus de temps. Si j'en laisse la présidence, me retirant du Conseil d'Administration, je ne quitte pas le Point de Capiton dont je reste membre. Lors de l'assemblée générale de
novembre 2005, je me suis engagée à mener à bien
un projet de rencontre avec Alain Didier-Weill, que nous avions reçu
lors du colloque " La loi Symbolique " à la Chartreuse
de Villeneuve les Avignon.
Ainsi, lorsque l'on tourne une page, importe-t-il qu'une
transmission ait pu avoir lieu, et que, ici ou là, une belle
idée se soit répandue. Je souhaite au nouveau Bureau du Point de Capiton, à son CA renouvelé, une belle route faite de cette rigueur nécessaire qui augure d'un long voyage et d'heureuses surprises. Bien amicalement (décembre 2005) |
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