Simone Molina

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Simone Molina

-    Carpentras      -     Déflagration     - La haie    -
-     Les errants    -    Fort St André    -


 

Ils nous ont plongés dans la nuit et le brouillard.
L’espace d’une nuit,
ils nous ont ramenés en arrière,
dans le fond de l’Histoire.
Et nous sommes accablés.
Nos yeux se vident sans que nous le voulions.

L’Impossible a soudain
un visage
et des mains.
Sa haine a répandu sa trace
entre les tombes.

Ils ont profité du sommeil des vivants
et du sommeil des morts.
Ils ont exhumé nos blessures
et les ont retournées contre l’Homme.

Même écrite,
la page restera
blanche.


Déflagration.



            Longtemps après
L’on trouve de la poussière
            Dans les pages des livres.
La poussière, les gravats
            Y tracent l’écriture
De ma terre natale.
            Si j’y verse mes larmes
Une fleur s’épanouira,
            Peut-être,
Et l’exil et le temps
            Pourront me supporter.


 

La haie se déshabille dans le vent.
Elle garde ses diamants,
là-haut, sa folle chevelure.

Frôlant sa nudité,
bientôt refleuriront,
les résilles moirées
de frêles araignées
gardiennes de l’automne.

 


 

Ils sont le long des routes
à dérouler le temps
Ils ont oublié l’heure
la  saveur du confort
Leur parfum
est l’humus humide
au bord des champs
Suaire sous la pluie
leur habit dérisoire
Ils ont les cheveux longs
et ressemblent à des anges
invisibles aux passants
fuyant dessus l’asphalte.



 

Echancrure de la nef
effondrée

L’oiseau
éphémère

éternel est son vol
comme sont le pianiste et                      la musique qui coule
de ses doigts.

Sous le Fort Saint-André,
la musique emplit l’ogive
en un triangle d’éternité.

L’homme frémit sur son piano,
artificier ruisselant
sous la tour millénaire.

Les oiseaux défient Schoenberg.
Ils planent dans un ciel de traîne.
Chaque note
échappée
comme un projectile.


Echancrure de la nef
éventrée.


Au-delà,
sur la pente jaunie par l’été,
le passant,                                             là-bas...


Il faudrait raconter ce lieu
année après année.
Ces instants de repos,
                        d’oubli paisible.

Déchirure sur le ciel et le Fort,          la musique


   Sur la pierre blanchie
un sillon de lumière,
les cigales
transcendent
chaque vibration de l’instrument.

Année après année,
les oliviers légers
répandent leur ramure
immergent les passants.


Un jour,
un chien jouait et deux enfants
riaient.
Songeaient-ils à cette                   musique évanouie,
à ces pétrifiés sur leur chaise,
à ce bonheur qui remuait                          en dedans d’eux ?   

 


© Simone Molina
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